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la surprise d'Azrou !
 
tête de sanglierC'était au Maroc, au début de la seconde moitié des années 50, et plus précisément aux environs d'Azrou, dans le Moyen-Atlas.....
 
Ce jour-là un bon copain et moi-même participions à une battue aux sangliers. Son père était chasseur, mais vu notre âge nous ne portions pas de fusils. À l'instar des " tireurs ", nous étions cependant postés sur une sorte de ligne de crête, et étions censés détourner les éventuels " cochons ", afin de les contraindre à passer sous le feu des chasseurs.
 
Les bêtes étaient souvent très grosses, potentiellement dangereuses, et plus encore en cas de blessures. Si besoin était, notre agilité, et les branches basses des grands cèdres, constituaient notre seule mais excellente sauvegarde.
 
La chasse était lancée, et en contrebas nous entendions les cris des nombreux rabatteurs, et le tintamarre discordant de leurs tambourinements sur toutes sortes de bidons, gamelles, et autres morceaux de tôles.
 
L'effarouchement commençait à porter ses fruits et les premiers coups de feu venaient de claquer, quand un très inquiétant silence s'est rapidement propagé sur la montagne.
 
N'en comprenant pas la raison, et faisant fi de toute prudence, nous sommes finalement descendus à la rencontre des rabatteurs. Des chasseurs étaient déjà là, et à les entendre des rabatteurs avaient vu une grande panthère.
 
La nouvelle s'était transmise comme une traînée de poudre, et pris de peur beaucoup avaient en quelque sorte déjà " désertés ". De fait le gros félin n'est pas du genre à plaisanter quand il est dérangé, et encore moins quand il se sent pourchassé ou acculé.
 
Sans trop croire à la réalité de l'animal, mais le cas échéant craignant qu'il s' en soit pris à un des rabatteurs, il a été décidé d'explorer la zone où la bête avait été soi-disant aperçue.
 
Ce faisant nous sommes rapidement tombés sur les traces toutes fraîches de l'animal, et là le doute n'était plus permis. De fait, à la période de cette chasse il y avait de très nombreuses plaques neigeuses et les empreintes du fauve s'y voyaient comme le nez au milieu de la figure.
 
Autant dire que la chasse a tourné court, mais que croiser la route du grand félin a été un moment d'intense émotion. En l'occurrence c'était même un quasi privilège car il était facile d'imaginer qu'un jour viendrait où la bête serait statufiée, tel le dernier lion de l'Atlas tué non loin de là, à Ifrane, en 1920.
 
Pour l'heure j'ignore ce qu'il en est, mais à l'époque de cette " historiette " la panthère était encore bien présente, quoique toujours rare, et 4 ou 5 fois dans l'année la presse se faisait l'écho d'accidents. Le plus souvent il s'agissait de petits bergers cherchant instinctivement à protéger leurs troupeaux, et parfois de promeneurs ou de pêcheurs isolés s'adonnant à leurs loisirs hors des sentiers battus.
 
Tuer ce bel animal était privilège royal, et il ne faisait pas bon l'oublier. Les quelques bêtes tuées annuellement étaient souvent naturalisées à Meknès, là où nous habitions. Le taxidermiste en question était également propriétaire d'une quincaillerie, et dans sa vitrine les animaux " empaillés " voisinaient curieusement avec les batteries de casseroles et autres ustensiles de cuisine ou de bricolage.
 
Cela dit c'était véritablement un artiste, et mes bestioles piquées au formol faisaient bien pâles figures en regard de ses réalisations plus vraies que nature. Un jour il me souvient m'être enhardi, et avoir été lui expliquer mes déconvenues et solliciter quelques conseils.
 
Bien mal m'en a pris, car au nom du sacro-saint " secret professionnel ", je me suis fait proprement rembarrer. A croire que mes 15 ou 16 ans allaient lui faire de l'ombre, voire lui retirer le pain de la bouche. J'ai donc été contraint d'apprendre par moi-même, mais il m'a fallu des années de persévérance et de tâtonnements.
 
Bien longtemps après j'ai eu l'opportunité de pouvoir exercer dans un laboratoire de Zoologie de l'Enseignement Supérieur, et n'ayant rien oublié je me suis toujours fait un devoir, et un plaisir, d'initier bon nombre d'étudiants aux diverses techniques muséologiques.
 
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