Grand consommateur d'escargots, mais aussi de visqueuses limaces (en net 2e choix me semble-t-il !), le Lampyre marque là encore sa différence en usant d'une technique pour le moins originale, et quasi chirurgicale. Il anesthésie en effet ses proies avant de les consommer, et il s'agit bien d'une anesthésie car les escargots en question sont susceptibles de "récupérer". Bien entendu il ne faut pas laisser le Lampyre passer à table, car c'est un adepte de la digestion extra orale, et à ce titre il liquéfie littéralement les tissus de sa victime avant de les absorber. Cette précision apportée, l'anesthésie en question est si efficace, et si subtilement instillée, que les quelques morsures infligées à cet effet paraissent d'aimables bécots, et ne provoquent aucune réaction de défense de la part de la victime ( rétraction dans la coquille, ou émission de mucus par exemple). Ces dernières demeurent toutefois possibles avec des proies de grande taille, mais il en faut plus pour éviter ... le "passage à la casserole" !
A titre indicatif, et comparatif, de nombreux Hyménoptères paralysent leurs proies, le plus souvent en vue d'assurer la subsistance de leur descendance. Cette paralysie est cependant irréversible, et elle résulte d'un coup d'aiguillon, au demeurant toujours très efficacement porté, car bien placé pour atteindre les centres nerveux de la victime.
A la fois 7e patte et ...
La larve du lampyre dispose de 6 pattes parfaitement fonctionnelles, mais elles sont dépourvues d'ongles griffus, apanage de l'adulte, et se terminent donc par une simple pointe chitinisée, à l'évidence moins performante. Afin de parfaire le maintien et la propulsion, Dame Nature a prévu un "pygopode", sorte de "béquille" fonctionnant à la manière d'une 7e patte (à voir en vidéo ! ). Concrètement l'extrémité abdominale se replie, et fournit ainsi un appui supplémentaire (synchro avec les pattes), permettant de s'arque bouter, et au besoin de pousser pour faciliter la progression, ou encore "crapahuter", par exemple en terrain pentu ou accidenté.
Là où les Driles (héliciphages voisins des Lampyridae) disposent d'une forte ventouse anale, le pygopode du ver luisant est doté d'une sorte de bouquet de tentacules adhésifs excertiles qui jouent le même rôle, répondent aux mêmes besoins, et sont pareillement situés au niveau de la zone anale. Concrètement ces tentacules ajoutent à l'efficience de la béquille et permettent à la larve de se maintenir ou se déplacer sur des surfaces plus ou moins lisses ou glissantes, telle une coquille d'escargot rendue humide par la pluie ou la rosée. La puissance de cette adhésivité est telle que des larves à terme, et donc au maximum de leur corpulence, se maintiennent facilement sur une plaque de verre tenue verticalement.
... "gant de toilette" !
Les escargots étant bien connus pour baver ( et les éléphants pour "tromper" dit-on ! ) Dame Nature a été amenée à se "décarcasser" (comme qui vous savez ! ) pour trouver une parade à la viscosité des limaces, et plus encore à l'abondant et gluant mucus de certaines espèces de "cagouilles". Cela vaut notamment pour le classique et très commun "p'tit gris" (Helix aspersa), à la fois prisé des lampyres ... et des gourmets !
Dans la majorité des cas, surtout s'il s'agit de petits spécimens, ou d'espèces non baveuses (comme Theba pisana et Cepaea nemoralis), la conjugaison de propriétés plus ou moins antiadhésives et autonettoyantes suffit pour assurer l'entretien courant des organes essentiels du lampyre, qu'il s'agisse des pièces buccales ou des dispositifs sensoriels associés. A contrario, des proies "récalcitrantes" ou de grande taille peuvent s'avérer plus "salissantes", et obliger la bestiole à sortir le grand jeu. Là encore ce sont les fameux tentacules, à l'évidence "multifonctions", qui font office de ... "gant de toilette" !
Plus qu'un long discours cette édifiante vidéo vous montrera la bête à l'oeuvre, et vous pourrez apprécier l'efficience et la précision de ce peu banal toilettage. Vous noterez la capacité des tentacules à retirer ce qui doit l'être, quitte à devoir véritablement l'arracher, et l'effort fourni est visiblement patent. Les salissures ainsi récoltées et amassées sont ensuite "abandonnées" par le biais d'un bref frottement des tentacules sur le substrat environnant, un peu comme nous nettoyons des bottes boueuses en les passant dans l'herbe ... efficacité et rapidité en sus ! Pour conclure vous noterez la convergence de ces tentacules ( forme et usage ! ) avec un "balai à franges" (ci-dessous figuré), nouvelle preuve, si besoin était, que les inventions humaines sont avant tout celles de la Vie et de la Nature.