ACCUEIL - COLEOPTERES - LEPIDOPTERES - AUTRES -VIDEOS - HISTORIETTES - NEWS - LIENS - WANTED ! - MAILS d'OR -
 
 
Le PSYLLE de l'ÉLÉAGNUS ou PSYLLE du CHALEF !
( Cacopsylla fulguralis, Homoptère Psyllidae)
 
(page 2 sur 3)
 
 - pour quitter les agrandissements faire "page précédente" dans votre navigateur -
 
En raison de sa fréquence l'indésirable bestiole est très présente sur le Web ... le plus souvent en vue de la détruire !
Sans nier ses méfaits, j'ai souhaité apporter un autre regard, l'approche de l'entomologiste différant censément de celle du jardinier.
Cet insecte ayant la réputation d'être mal connu, j'espère ainsi contribuer à sa connaissance… afin de le mieux combattre !
 
Intro !

Découverte au coeur de l'hiver (mi-janvier) une belle population de psylles squattait un éléagnus d'Ebbing ( Elaeagnus x ebbingei pour les intimes ! ), non loin de mon domicile. Encore appelé "chalef"' l'arbuste était isolé, et le feuillage parasité aisément accessible à travers les larges mailles du grillage clôturant un pavillon. L'occasion était évidemment trop belle pour la laisser passer, mais la petitesse de ces insectes s'est avérée un véritable challenge technique, notamment en regard des capacités de mon petit Lumix TZ30 .... fut-il de longue date "bidouillé maison" en vue des "missions impossibles" !  

Les Psylles ... en général !

Les Psylles sont des insectes Homoptères, et à ce titre ils "voisinent" ( entre autres ! ), avec les cigales, cicadelles, et pucerons. Bien entendu ils empruntent aux uns et aux autres, à commencer par les ailes en toit au repos, et une relative aptitude au vol, mais aussi par la présence d'un rostre piqueur-suceur en charge de "pomper" la sève nourricière. A cela s'ajoute la faculté de sauter tous azimuts comme des puces (d'où le nom de "puces de feuilles" parfois donné ! ), grâce à des fémurs postérieurs souvent qualifiés de ... "renforcés" ! Bien entendu, cela ne facilite pas la tâche des prédateurs ... ni celle du photographe ! Au passage, vous noterez que les insectes sauteurs sont parfois dits "saltipèdes" .... car dotés de pattes "saltatoires" ! .... CQFD !

Par leur très petite taille, le plus souvent autour de 2 à 3 mm, et par la sécrétion de cires et miellats favorisant la formation de fumagine, les Psylles ne sont pas sans rappeler certains pucerons. La confusion est même parfois possible, comme avec le puceron lanigère (Eriosoma lanigerum). Ces "faux pucerons" sont toutefois aisément reconnaissables par la constance morphologique des adultes (au sein d'une même espèce s'entend), alors que le polymorphisme est de règle chez les vrais pucerons.

De très nombreuses espèces de Psylles sont connues, la seule Alsace en hébergeant déjà 64 (Malenovsky, 1999). Ces insectes sont très spécialisés, chaque bestiole ayant pratiquement son végétal attitré, tels les psylles des orties, des joncs, du buis, ou encore des ronces. Idem pour les arbres, y compris décoratifs (mimosa et arbre de Judée par exemple), et surtout fruitiers (tels les psylles du poirier, du pommier, du figuier, de l'olivier). Il s'ensuit bien sûr de sérieux problèmes en cas de pullulation du parasite, à commencer par le dessèchement du feuillage, d'où l'affaiblissement des arbres sévèrement touchés, avec souillure des fruits le cas échéant. A cela s'ajoute la difficulté des traitements en raison du chevauchement des générations, et de la protection induite par les excrétions cireuses.

 ... et celui de l'éléagnus ou chalef en particulier !

Comme celui de l'albizia (voir page entomo ! ), le psylle de l'éléagnus ( Cacopsylla fulguralis ) est un "cadeau" de la mondialisation. Originaire d'Asie de l'Est , il a été découvert en 1999, au nord-ouest de la France (Saint Paul de Léon, source OEPP = EPPO ) sur Elaeagnus x ebbingei. Ce parasite s'est depuis très largement répandu, puisqu'il est notamment connu d' Angleterre, Belgique, Pays-Bas, Suisse, Espagne, Croatie ... et plus encore sans doute !

Aussi surprenant que cela puisse paraître ce psylle est actif dès l'instant ou le mercure atteint les 2 ou 3° centigrades, d'où la trouvaille ci-dessus mentionnée, toutes les illustrations étant d'ailleurs estampillées janvier 2019. A contrario larves et adultes se font moins présents en été, au point de pouvoir disparaître quand les températures élevées perdurent au-delà des 30°. Les parasites "refont surface" en automne, après une sorte de diapause passée par exemple au sein de la litière sous-jacente ou proximale.

Comme toujours chez les psylles, plusieurs générations peuvent se succéder et se chevaucher, leur nombre étant bien sûr fonction des conditions climatiques du lieu et du moment. Dans le meilleur des cas le cycle larvaire de ce psylle serait bouclé en guère plus d'un mois. La donnée est tout à fait plausible, mais je n'ai pas eu l'occasion d'en vérifier l'exactitude. Cette "page entomo" est en effet issue de simples observations, là où d'autres sont plus orientées sur une expérimentation basée sur l'élevage.

 
L' adulte !
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), adulte, photo 1 Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), adulte, photo 2 Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), adulte, photo  3
Dans la mesure où ce psylle est inféodé aux éléagnus (avec prédilection marquée pour Elaeagnus x ebbingei), son identification va bien sûr de soi. Vous noterez que les psylles sont très fréquemment, si ce n'est la plupart du temps, inféodés à une Famille végétale, voire un Genre, et même une espèce.
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), adulte de face. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), adulte sur décimètre. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), adulte sur allumette.
 
 
 L'atteinte au feuillage !
Comme dirait Mr de la Palisse ( = Palice ! ), plus les psylles sont nombreux, et "plus c'est pire" ! Comme les "gros plans" ci-dessous le montrent, tout ce qui est évacué par les larves (cires, miellats, sucres, exuvies), et tombe à la surface des feuilles sous-jacentes, constitue un excellent "terreau" pour la fumagine. En s'étalant à la surface des feuilles et des rameaux, ce champignon microscopique, et noir ( d'où son appellation ! ) altère la "respiration" du végétal, et accélère le dépérissement et la chute du feuillage. Même si la survie du végétal s'en trouve rarement compromise, l'esthétique peut à l'évidence gravement en pâtir.

Vous noterez que les pluies de quelque importance sont évidemment bénéfiques, car en dissolvant les "sucres" elles permettent d'éliminer une partie non négligeable des dépôts ... voire des "dépotoirs" ! L'amélioration, y compris visuelle, est aussi notable qu'éphémère car les minuscules bestioles ne cessent de sécréter ... ce qui vient d'être lessivé !

 
Eléagnus, feuillage sain. Eléagnus, feuillage avec fumagine. Eléagnus, feuillage  sain et avec fumagine. .............Eléagnus, feuillage avec fumagine, ensemble. Eléagnus, feuillage avec fumagine., détail.
ci-dessus à gauche : comparaison entre rameaux sains et "fumaginés"; à droite : détail des photos précédentes montrant le piteux état de surfaces foliaires aux allures de "dépotoirs"; ci-dessous : 26 février : aspect du feuillage ("in situ") durant la nette reprise d'activité des psylles, avec détail au centre.
Eléagnus, aspect du feuillage, in situ, suite à l'attaque des psylles, photo 1. Eléagnus, aspect du feuillage, in situ, suite à l'attaque des psylles, photo 2. Eléagnus, aspect du feuillage, in situ, suite à l'attaque des psylles, photo 3.
 
 
Dimorphisme sexuel !
Il est bien marqué, mais la petitesse de la bestiole le rend indiscernable à l'oeil nu. Tout se passe, si je puis dire, au niveau des extrémités abdominales, et donc des zones qualifiées de génitales. Chez la femelle l'abdomen se prolonge par une très robuste et acérée tarière en "V", la gouttière ainsi formée lui conférant le rôle d'ovipositeur. Chez le mâle l'extrémité abdominale apparaît comme tronquée et se termine par une 1/2 sphère semblant faire office de rotule orientable en vue de l'accouplement. Cette pseudo-rotule est elle-même dotée d'une sorte de pince, fonctionnant comme telle, et donc supposée favoriser le maintien du mâle en bonne place, génitalement parlant.
 
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  tarière femelle, photo 1. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  tarière femelle, photo 2. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  femelle immature et tarière. .............Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), extrémité abdominale mâle. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  mâle immature, avec pince abdominale. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  mâle immature, avec pince abdominale, détail.
 à gauche : gros plan sur la tarière prolongeant l'abdomen des femelles, et mise en évidence de cette même tarière sur individu totalement immature; à droite : extrémité abdominale du mâle, montrant la pseudo rotule et sa pince, puis mise en évidence de cette dernière sur mâle venant là aussi de faire sa mue imaginale.
 
 
 L'accouplement !
Le "Kamasutra" entomologique, si je puis dire, est bien sûr fonction des espèces, et de leur morphologie. Les accouplements par chevauchement et par opposition sont bien sûr les plus courants, le plus "class" ( dit "en coeur" ! ) revenant à juste titre aux agrions, les plus graciles de nos libellules. A contrario la palme du plus "hard" est non moins logiquement décernée à l'accouplement dit "traumatique" ...  et pour cause ! Entre autres espèces, c'est notamment le cas de la punaise des lits où le mâle plante son très acéré pénis quasi n'importe où, Dame Nature semblant avoir oublié de donner ... le mode d'emploi ! Vraiment ballot me direz-vous, mais ça marche ... et même bien ! (voir "page entomo sur ladite punaise ! ). Chez les psylles l'accouplement se fait sur le mode "côte à côte", et c'est l'extrémité abdominale du mâle, plus souple, qui s'incurve pour rejoindre celle de la femelle.
 
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  accouplement, photo 1.  Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  accouplement, photo 2............. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  accouplement, photo 3. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  accouplement, vue ventrale.............. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  accouplement,  sur allumette.
 Exemples d'accouplements, selon un mode "côte à côte" pouvant se qualifier de "classique", voire banal.
La petitesse de la bestiole et sa réactivité ne permettent pas d'en préciser la durée, ni son éventuelle répétitivité.
 
 
 Les oeufs !
La ponte fait bien sûr suite à l'accouplement, et la taille des oeufs, de l'ordre de 3/10e de mm, est à la mesure de la petitesse de l'insecte. Via la tarière précédemment décrite, les oeufs sont insérés un à un dans la partie superficielle du revers foliaire. De très pâle à l'émission, l'oeuf vire à un jaune soutenu au fil de l''incubation et laisse transparaître des taches plus ou moins orangées témoignant du niveau de développement embryonnaire. Les oeufs sont relativement "concentrés", ce qui facilite le regroupement des larvules naissantes et la formation de petites colonies larvaires. Tout allant très vite au pays des psylles, l'incubation est de l'ordre de quelques jours.
 
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  tarière femelle, photo 1. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  tarière femelle, détail............. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  groupe d'oeufs. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  oeufs in situ, détail.
ci-dessus à gauche : la très robuste tarière, et sa gouttière, permettant d'insérer les oeufs dans la face interne des feuilles; à droite : oeufs "in situ"; ci-dessous à gauche : oeufs extraits permettant d'apprécier la forme, la taille, et la coloration; à droite : larves naissantes ... au plus 4/10e de mm !
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  oeufs isolés. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  oeuf, mesure. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  oeuf sur allumette. ........... Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), larvules naissantes.
 
 
Les larves !
Le développement larvaire comporte 5 stades, au cours desquels la bestiole va passer en l'espace d'un mois d'à peine 4/10e de mm ... à près de 2 mm ! Ces larves sont par nature très peu "remuantes", mais en cas de dérangement elles peuvent faire preuve d'une belle vélocité. S'y ajoute une réelle endurance car j'ai eu beaucoup de mal à photographier les larves naissantes ci-dessus à droite, car les minuscules bestioles n'arrêtaient pas de "faire des longueurs" sur l'allumette ... comme les sportifs en font en piscine !
 
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  larve âgée, photo 1. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  larve âgée, photo  2 ...........Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  groupe de larves, photo 1. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  groupe de larves, photo 2. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  groupe de larves, photo 3. .......... Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis), exuvie imaginale.
à gauche : larves à terme (et donc en instance de passer au stade adulte) reconnaissables aux ébauches alaires bien développées;
au centre : tout venant ! à droite : exemple d'exuvie. 
 
 
 ... et en hiver !
En dessous de 10° la très grande majorité des insectes entre en "dormance", mais les psylles de l'éléagnus conservent une activité significative alors que la température est de très peu positive (2 à 3°). Le fait n'est pas systématique, mais pour parer aux frimas hivernaux de quelque importance, en terme de niveau ou de durée, de petits groupes de bestioles peuvent s'installer plus ou moins durablement entre des feuilles venues fortuitement en contact, les sécrétions en tous genres servant à la fois de liant et de calfeutrage périphérique.
 
Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  gîte hivernal, photo 1. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  gîte hivernal, photo 2. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  gîte hivernal, photo 3.............. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  gîte hivernal ouvert, photo 1. Psylle de l'éléagnus  ou psylle du chalef (Cacopsylla fulguralis),  gîte hivernal ouvert, photo 2.
 à gauche : exemples de "niches" hivernales, entre feuilles superposées; à droite : et après mise à nu de "nichées".
 
 
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr