- Devant normalement changer d'escargot,
comme ses "copines" l'on fait, une larve a dérogé en
témoignant d'une peu banale originalité.
Passée au 5e et dernier stade larvaire le
20
septembre, elle est en effet
restée dans sa vieille coquille (et donc "sans manger ni
boire" ! ) jusqu'au 22
octobre, date d'une surprenante
mutation !
Le fait qu'elle ne quitte pas un
escargot, disons "usagé", m'avait de suite alerté et
la bête était évidemment sous haute
surveillance, via 2 petites "fenêtres" pratiquées
dans la coquille. Ayant déjà été
leurré par une exuvie trop réaliste,
l'extrémité abdominale encore visible, était
quotidiennement sollicitée ( en l'occurrence
"titillée" ! ) avec un très fin pinceau de
façon à provoquer une réaction, à la
fois signe de vie, et de non évolution
morphologique.
Le 22
octobre le test du pinceau "3
poils" ne m'a pas convaincu, pas plus que celui des
fenêtres. Pressentant qu'il se passait "quelque chose" j'ai
agrandi une des ouvertures, et très vite découvert (
et extrait ! ) une sorte de prénymphe fraîchement
formée. Je dis bien une sorte, car la bête
était nettement plus "poilue", avec des mandibules et
pattes "timidement" atrophiées, ces dernières
restant d'ailleurs en grande partie fonctionnelles. La
mobilité de la bête s'est d'ailleurs
avérée bien plus importante et prolongée que
celle d'une prénymphe classique, tout en restant
très en deçà de celle d'une larve normale.
Par commodité, et pour bien illustrer l'aspect
chimérique de cette ambivalence larve / prénymphe,
la bête sera qualifiée de "pseudo-prénymphe"
-
- La "pseudo-prénymphe" ...
tous azimuts !
- ci-dessus : vues dorsales (les
trois premières photos ont été prises
sitôt l'extraction, et donc de nuit en lumière
artificielle); ci-dessous à
gauche : vue ventrale avec détail des "plages
rugueuses" dont le rôle locomoteur a été
antérieurement précisé; à droite
: sous la toise !
.................
- La tête !
.....
- Constat non moins troublant, je n'ai pas
trouvé trace de l'exuvie, hormis au fin fond de la coquille
du "cagouille" où gisait une capsule céphalique
parfaitement conservée, mais manifestement ... "XXL" !
Alors que l'inverse est logiquement de règle, croissance
oblige, cette capsule était en effet nettement plus grande
que la nouvelle tête de la bestiole. L'absence de nourriture
est sans doute à l'origine de cette régression
crânienne, tout comme la taille réduite de la
bête, sorte de chimère évoluant entre larve
normale et vraie prénymphe, d'où l'appellation
précitée de "pseudo-prénymphe".
-
............

- à gauche: illustration de
la réduction crânienne de la pseudo-prénymphe,
et gros plan de l'exuvie; à droite :
évolution des mandibules : photo 1: tête de
larve (exuvie d'une L4); photo 2 : tête de la
nympho-larve; photo 3 : tête de prénymphe.
Vous noterez la conformation intermédiaire des mandibules
de la nympho-larve, ces dernières étant a priori non
fonctionnelles (escargots totalement ignorés !
).
-
- .... et les
"jambes" !
- Loin d'être atrophiées
comme le sont celles des vraies prénymphes, les pattes de
la pseudo-prénymphe sont néanmoins réduites
en regard de celles des larves "normales", et c'est
particulièrement patent au niveau des tibias. Vous noterez
la conformation nettement intermédiaire de ces pattes
(comme pour les mandibules ci-dessus), cela valant
également au niveau de leur
fonctionnalité.
-
..............
..............

- à gauche : sur
prénymphe les pattes sont franchement atrophiées, et
impropres à une véritable locomotion;
à droite : pattes larvaires
"normales" (sur exuvie de L4) assurant une mobilité
aisée; au centre : pattes de la
pseudo-prénymphe, en quelque sorte ... fifty-fifty
!
-
- La mobilité
... illustration !

- à gauche : séance
d'étirement ! au centre : le "pont", 1ere phase du
retournement quand la bête est sur le dos; à
droite : juste avant le retournement ! La tête servant
de pivot, la torsion de l'avant corps provoque le basculement et
la retombée sur les pattes ... CQFD
-
-
- - 2e épisode :
... et rebelote
!
Aussi surprenant que cela puisse
paraître la pseudo-prénymphe ci-dessus décrite
a mué le 28
Novembre, et donné vie
à une véritable "copie conforme" de ce qu'elle
était précédemment. Même aspect
général, même morphologie au niveau des divers
appendices (buccaux, locomoteurs, apophysaires), même
comportement locomoteur et défensif, même
désintérêt vis à vis des proies
proposées (très petits Helix aspersa). Il s'ensuit
une pseudo-prénymphe bis, correspondant à une sorte
de 7e stade larvaire, là où la norme est de 5 pour
les femelles.
En dépit de pattes
censément invalidantes, car partiellement
atrophiées, la bête peut se déplacer "au
ralenti", en quelque sorte "à pas comptés", mais
néanmoins avec une certaine aisance, comme cette
vidéo le montre. Par
contre, comme au stade précédent, la faculté
d'ainsi se mouvoir décline très rapidement et ne va
pas au-delà de 48 à 72 h.
-
.................

- à gauche : photos
réalisées de nuit, peu après la mue. Vous
noterez la technique de retournement, désormais classique.
à droite : entre étirements et
rétractions, la taille réelle est difficile à
chiffrer, mais elle est présentement identique (12 mm)
à ce qu'elle était avant mue.
-
-

- La pseudo-prénymphe "bis"
... panel iconographique !

-
-
- 3e épisode
: mue à
rebours !
La norme et la logique voudraient que la nymphe succède
toujours à la prénymphe, mais contre toute attente
cette dernière peut parfois donner vie à une larve
active. A défaut de pouvoir l'expliquer, la
littérature spécialisée se borne à
faire état de cette étonnante possibilité
d'évolution à rebours. Présentement on
pourrait mettre en cause les modalités d'élevage,
fatalement différentes des conditions naturelles, mais la
qualité et l'homogénéité des
résultats ne plaident pas en faveur de cette
hypothèse. Il s'ensuit donc un gros point d'interrogation
concernant le ou les facteurs induisant cette forme d'involution,
sans parler de ses implications physiologiques, et plus encore de
sa raison d'être.
-

- ci-dessus : la "larve
à rebours", photographiée et
filmée en action
nuitamment lors de sa découverte le 30 décembre
2017.
- ci-dessous : après
pigmentation et sclérification. Contrairement à la
photo ci-dessus à droite, la larve est ici
"décontrastée" (dixit l'inénarrable Garcimore
! ) d'où une taille excédant les 15 mm, ce qui est
tout à fait remarquable. Comme le montre le
récapitulatif final la bête est en effet
restée totalement à jeun durant près de 3
mois et 1/2 ... tout en muant 3 fois (et même 4 fois si l'on
compte la mue initiale).

-
-

- ci-dessus :
l'incontournable allumette ... échelle oblige
!
- ci-dessous à gauche : le
passage à table de la "larve à rebours" (sur petit
Helix aspersa), 60 heures après son émergence;
à droite, photo 1)- une semaine après
s'être attaquée à sa proie, et avoir "fait le
plein" (si l'on peut dire ! ) la larve vidange classiquement ses
intestins. Le rejet excrémentaire, très liquide, est
très vite "pompé" par le substrat tourbeux des pots
d'élevage, mais sur plastique il est bien visible
(flèche) fut-il desséché comme dans le cas
présent. Vous noterez également les très
visibles plages sclérifiées (cercle) des segments
ventraux (sternites ! ) de la larve; photo 2)- le rejet
intestinal après réhydratation.
................
.

-
Pour bien comprendre
: je rappelle qu'outre
le stade nymphal proprement dit, le drile adulte passe
préalablement, et obligatoirement, par un stade
prénymphal généralement
considéré comme une forme de protection permettant
de faire face aux agressions environnementales (hiver,
sécheresse, disette). Le " hic ", si l'on peut dire, c'est
que les modalités de ce stade se déroulent
pareillement en élevage, là où l'optimisation
des conditions de vie permet justement d'éviter les
aléas précités, tout en réduisant
fortement la durée du développement. Par-delà
son rôle protecteur, et ses spécificités
morphologiques, la prénymphe des driles correspond donc
à l'expression d'une véritable diapause
physiologique, à l'image de celle du grillon
champêtre précédemment prise en exemple.
Par voie de conséquence (la prénymphose
conditionnant le passage à l'état adulte), les "
larves à rebours " devront repasser par ledit stade
prénymphal. Il s'ensuit un logique allongement de leur
développement, dont les modalités et la durée
restent à déterminer. Cette "
valse-hésitation " physiologique peut expliquer la
possibilité de cycles portant sur 3 années civiles,
si ce n'est 4, étant entendu qu'il s'agit là de
durées d'autant plus exceptionnelles que l'exposition
à la prédation et aux contingences d'une vie de
drile s'en trouvent pareillement prolongées.
-
- - 4e épisode
: ... et re-mue
à rebours !
Nouvelle larve ? nouvelle prénymphe ? Le suspense a pris
fin ( après mue bien sûr ! ) avec l'apparition
progressive des plaques segmentaires larvaires. Leur coloration
foncée fait qu'elles sont en effet visibles par
transparence, à travers la coquille de l'escargot,
là où la coloration claire de la prénymphe ne
laisse rien paraître. La présente mue ayant eue lieu
le 2 février, et la précédente le 30
décembre, le rythme quasi mensuel s'en trouve une fois de
plus confirmé, cela valant également pour les larves
"normales".
Copie conforme de ce qu'elle était au 3e
"épisode", cette double larve à rebours s'est
longuement attardée dans sa coquille ( du 2 au 9
février), avant de "passer à table" le jour
même de sa sortie, là où un "délai" de
48 h est le plus souvent de règle.
-
............
............

- à gauche : 48 h
avant la mue, de nuit, et sous éclairage artificiel, les
plaques ventrales (sternites) de la larve sont très
nettement visibles.
- au centre : 24 h
après la mue rien ne transparait, l'incertitude demeure :
larve ? ou prénymphe ?
- à droite : 72 h
après la mue, maturation pigmentaire faisant, les plaques
ventrales deviennent perceptibles, et le doute s'en trouve
levé.
-
-

- ci-dessus, de gauche à droite
: 1)- la larve enroulée en position défensive,
avec son exuvie; 2)- l'exuvie larvaire; 3 et 4)- la
larve après sa double "marche arrière". Faute
d'avoir pu mesurer la bête, l'allumette permet
néanmoins d'en apprécier la taille; ci-dessous
à gauche : première morsure paralysante ( et
digestive ! ); au centre : la larve est entrée dans
le "vif du sujet"; à droite : l'escargot est en
partie liquéfié et ingéré, d'où
une larve prenant peu à peu des allures de "bibendum".

-
- - 5e épisode :
... re
prénymphe !
Alors que l'escargot ci-dessus avait
été attaqué le 9 février, et que nous
étions le 23 Mars ....
Rien ne passant, du moins en apparence
(la taille de l'escargot ne permettant pas de voir ce qui s'y
passait) j'ai pratiqué 2 fenêtres. Au niveau de la
plus éloignée du "sommet" de la coquille je suis
tombé sur une mue, tandis que la plus proche permettait de
voir une prénymphe (la 3e ) à en juger par l'aspect
et la mobilité de la bête.
Bien entendu cette nouvelle
prénymphe est sous haute surveillance afin de pouvoir
très précisément dater ce qui devrait
être le stade nymphal proprement dit.
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-
- Rappel
chronologique de la forme
"Quésaco"
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- - 20-09-2017 : mue, émergence de la larve au 5e et
dernier stade larvaire (et donc femelle ! ).
- - 22-10-2017 : mue, émergence de la prénymphe
bizarroïde dite "Quésaco".
- - 28-11-2017 : mue, émergence de la "prénymphe
"bis".
- - 30-12-2017 : mue, émergence de la "larve à
rebours" avec prise de nourriture.
- - 02-02-2018 : mue; 09-02-2018: sortie de la "larve à
rebours bis", avec prise de nourriture.
- -23-03-2018 : découverte d'une prénymphe "ter"
(date de la mue inconnue)
-
- En résumé
:
- 7 stades larvaires dits primaires, dont 2 surnuméraires
(avec prise de nourriture) précédés de 2
stades prénymphaux, et suivi d'un 3e stade
prénymphal ( soit 2 stades prénymphaux
surnuméraires ! ).
-
- Remarques concernant la
« Quésaco » :
- 1)- Pas de nourriture du
20-09-2017 au 30-12-2017 !
- 2)- 3 mues entre ces 2
dates (4 en comptant celle du 20-09-2017)
- 3)- au 3-04-2019 la 3e
prénymphe de la"Quésaco" est toujours vivante !
-
- Epilogue
!
- La "Quésaco" est
finalement partie avec ses petits secrets !
- (trouvée morte et
putréfiée fin mai 2019)
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FIN
-