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La Zeuzère du poirier, ou "Coquette" (Zeuzera pyrina) !
(Lépidoptère Cossidae)
 
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Présentation !

Plus connu sous le nom de "Zeuzère du poirier", ce papillon nocturne est également appelé la "Zeuzère du marronnier", ou encore la "Coquette", la joliesse de sa livrée tranchant sur la "ternitude" des autres Cossidae, Famille représentée en France par 7 espèces. La plus grosse d'entre-elles, le "Cossus gâte-bois", mérite bien son nom, et une "page entomo" lui est également consacrée.

Dotée d'une envergure atteignant 60 mm, la Zeuzère est connue de toute l'Europe ( et même au-delà ! ), et n'a qu'une génération annuelle, comme tous les Cossidae. Présent jusqu'à 1200 m en montagne, ce papillon vole de juin à septembre. Il peut se rencontre quasiment partout, y compris dans les parcs et jardins, et plus encore dans les vergers où la chenille peut causer de sérieux dégâts. Elle est en effet xylophage, comme le sont toutes les chenilles de Cossidae, et par-delà les pommiers et poiriers ( ses essences fruitières préférées ! ), elle s'attaque à plus de 150 espèces de feuillus, arbres et arbustes, y compris ornementaux. Autant dire que ce n'est pas un cadeau, l'originalité et la "coquetterie" de la Zeuzère n'enlevant rien à sa nuisibilité.

Vous noterez qu'au pays des Cossidae ( cette Famille n'ayant pas l'exclusivité ! ) les papillons ne s'alimentent pas, la trompe normalement dévolue à cet effet étant atrophiée, voire carrément absente. Comme toujours en pareiI cas, il s'ensuit logiquement une durée de vie très limitée, entièrement axée sur la reproduction. De ce fait tout va censément très vite, à commencer par des oeufs "prêts à pondre" dès l'émergence du papillon. Vous noterez également que les papillons nocturnes éclosent le plus souvent en après-midi, quelques heures avant la survenue de la nuit, laps de temps leur permettant de tranquillement sécher leurs ailes avant envol, mais aussi d'être "opérationels" ... si affinités :-) !

  
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), adulte, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), adulte, photo 2. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), adulte, photo 3
ci-dessus : joliment parée de blanc, et mouchetée de bleu-nuit plus ou moins "métallisé", la bien nommée "Coquette" est dotée d'un thorax empruntant au plus blanc et plus fin des cotons. ci-dessous à gauche : la belle en main ! à droite : illustration d'un gros "coup de bol", car en une seule nuit plus de soixante Zeuzères ont été "cueillies" à l'émergence, grâce à mon piège lumineux. Le pire a donc été évité, car je vous laisse imaginer l'ampleur des dégâts, si ces redoutables bestioles n'avaient été "interceptées" à temps. J'ajouterais que cette étonnante récolte a fait le bonheur des oiseaux familiers du jardins, et que la mort de mes lilas n'est sans doute pas imputable à la seule sécheresse. 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), adulte en main, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), adulte en main, photo 2 ............... Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), adultes en main, photo 3.
 
Dimorphisme sexuel !
Mâles et femelles sont très comparables d'aspect, mais néanmoins aisément identifiables. Les antennes du mâle sont en effet fortement bi-pectinées sur leur moitié basale, là où celles des femelles sont entièrement filiformes. D'autre part ce papillon a la particularité de "faire le mort" (*) quand il est dérangé ( et donc pris en main par exemple ! ), et à cette occasion la femelle a fortement tendance à largement faire saillir son organe de ponte (= ovipositeur ! ).
(*) il s'agit d'un phénomène défensif ( savamment appelé "thanatose" ! ), très fréquent dans le monde animal, et pas seulement chez les insectes.
 
 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  antenne du mâle. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  antenne  de la femelle. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  femelle faisant le mort.
à gauche : l'antenne du mâle, et son très typique "peigne", au centre : femelle avec ses antennes filiformes (voir agrandissement); à droite : individu "faisant le mort". Chez la femelle, comme ici, cette réaction défensive réflexe est souvent accompagnée de la sortie de l'organe de ponte.
 
La ponte ... et les oeufs !

Les très nombreux oeufs, de l'ordre du millier, sont émis de juin à août, au fil de l'éclosion des papillons. A cet effet les femelles de zeuzères sont dotées d'un ovipositeur dévaginable, très long et en quelque sorte "télescopique". Egalement très mobile et pourvu de soies tactiles, cet organe de ponte permet de très précisément insérer les oeufs en bonne place, par exemple dans les anfractuosités de l'écorce des arbres et arbustes nourriciers. Ils peuvent être déposés à l'unité, mais aussi sous la forme de "brochettes" comportant une dizaine d'oeufs accolés bouts à bouts. Bien entendu la ponte intervient après l'accouplement, mais la durée de vie des zeuzères étant limitée, de l'ordre de la semaine, l'union des sexes a souvent lieu le jour même de l'émergence des papillons ... avec déut de ponte dans la foulée !

 
  Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  femelle à pondre, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  femelle à pondre, photo 2
Femelles à pondre; exemples de "brochettes" d'oeufs, et oeufs en vrac ! 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  ponte en bâtonnets, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  ponte en bâtonnets, photo 2 Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  ponte en bâtonnets, avecallumette. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  oeufs en vrac.
 
La chenille !

Selon la température du lieu et du moment, les chenillettes éclosent de 2 à 3 semaines après la ponte. Dans un premier temps elles se font brièvement mobiles et s'attaquent au feuillage, telles des chenilles classiques, mais avec une préférence pour les parties "charnues" (pétioles, nervures). Elles vont ensuite s'insinuer sous l'écorce des jeunes rameaux, avant d'y pénétrer plus profondément.

Au fil de sa croissance la chenille peut être contrainte de quitter une branchette devenue trop exigue , au profit d'un plus confortable "logement". En pareil cas les trous de pénétration et de sortie perdurent, et accentuent les risque de cassures. Le développement larvaire est au mieux d'un an dans les régions méridionales, de 2 ans là où les conditions sont moins favorables, voire 3 ans en limite septentrionale de son aire. La chenille hiverne et à terme elle atteint une cinquantaine de mm, avec creusement d'une galerie médullaire pouvant fréquemment dépasser la vingtaine de cm.

Les méfaits de ces chenilles sont particulièrement patents et préjudiciables en pépinières. Ils se traduisent par le déssèchement des rameaux, le dépérissement des jeunes arbres et arbustes, voire la cassure des jeunes troncs lors d'épisodes tempêtueux. Les arbres plus âgés résistent mieux, mais les galeries générées, et l'affaiblissement qui s'ensuit, sont autant de portes ouvertes aux maladies et autres nuisibles.

La propagation du parasite est censément facilitée par son aptitude au vol, mais aussi par la faculté des très jeunes chenilles de se laisser emporter par le vent, tels de minuscules cerfs-volants. Il s'agit du "ballooning", technique très utilisée par d'autres chenilles, mais aussi chez les araignées.

 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  trou d'entrée de la chenille, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  trou d'entrée de la chenille, photo 2 ............Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  chenille in situ. ............ Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chenille in situ, détail, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chenille in situ, détail, photo 2.
ci-dessus à gauche : trou de pénétration après cicatrisation; au centre : la bête en place ! à droite : gros plans !
 ci-dessous : chenille à terme, tous azimuts !
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chenille en main, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chenille en main, photo 2 Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chenille sur allumette. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chenille sur règle graduée.
 

 

La chrysalide !

Au terme de son développement, et donc en Avril-Mai, la chenille se confectionne un cocon pour s'y chrysalider. Constitué de soie et de fibres de bois mêlées, le cocon est aménagé au sein même de la galerie larvaire. Comme celle du Cossus, ou encore de la Sésie apiforme (voire site) la chryalide de la Zeuzère est dotée de couronnes épineuses (spicules) qui lui confèrent une certaine mobilité. Le moment venu la chrysalide déchire son cocon et gagne l'air libre en suivant la galerie larvaire. Comme le Cossus, ou encore la sésie, la chysalide reste fréquemment coincée à mi-corps dans le trou de sortie, ce qui facilite l'émergence du papillon ... et le repérage de l'existence du nuisible !

 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  cocon, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  cocon, photo 2. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chrysalide in situ.
Le douillet cocon de la Zeuzère !
 
 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  chrysalide en main. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  chrysalide avec allumette. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  chrysalide sur règle graduée. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  chrysalide , détail des spicules.
ci-dessus : la chrysalide de la Zeuzère, avec mise en évidence des couronnes de spicules permettant sa "reptation".
ci-dessous à gauche : le "nez" de la chrysalide est doté d'un appendice assimilable à la "dent de l'oeuf" des poussins. Cet organe permet de percer / déchirer le cocon, et donc de libérer la chrysalide ... et son contenu ! à droite : la chrysalide, après éclosion du papillon.
 
Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  "dent" de la chrysalide, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina),  "dent" de la chrysalide, photo 3 ................ Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chrysalide après éclosion, photo 1. Zeuzère du poirier ou Coquette (Zeuzera pyrina), chrysalide après éclosion, photo 2.
 
  
En guise de conclusion ...
Il n'est pas trop tard pour inverser la tendance … du moins pas encore ! 

En 1962 Rachel Carson écrivait son fameux "Printemps silencieux"1, où elle dénoncait les ravages des pesticides en usage à l'époque ( tel le trop bien connu DDT ! ), n'hésitant pas à mettre en cause l'industrie chimique. Par-delà un titre particulièrement explicite, et un ouvrage s'avérant prémonitoire, la biologiste américaine pouvait-elle imaginer pire scénario que cette "6e extinction"2, autre livre publié en 2014 par Elisabeth Kolbert, journaliste en quelque sorte "ès environnement".

Au fil des 480 pages de son ouvrage, et au terme d'une enquête particulièrement approfondie, cette autre américaine se fait l'écho du consensus scientifique accréditant les premiers effets de l'extinction massive de notre biodiversité, la 6e du genre sur la planète terre. De plus, là où il fallait des millions d'années, il aura suffi d'une vie d'homme (et même moins ! ) pour enclencher un processus d'autant plus gravissime que sa rapidité ( de100 à 1000 fois supérieure à la normale ) ne permet pas à la diversité du vivant d'avoir le temps de s'adapter.

1- En 2006 ce livre fut déclaré par l'éditeur du Discover Magazine comme faisant partie des 25 plus grands ouvrages de tous les temps.
 2- La "6e extinction", sous-titrée "Comment l'homme détruit la Vie", a reçu en 2015 le prestigieux prix Pulitzer.
 
FIN !
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr