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La CHRYSOMÈLE de la VIORNE (Pyrrhalta viburni)
(Coléoptère Chrysomelidae)
 
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Intro !

Ses méfaits sont si évidents qu'il faudrait être aveugle pour ne pas les voir, mais en matière de nuisibilité cette chrysomèle est loin d'avoir l'exclusivité, ou de mériter sa place sur un quelconque podium. Par contre son originalité, bien réelle, tient au fait que les jardiniers usent pareillement, et couramment, d'une technique de semis tout à fait comparable à celle qu'elle met en oeuvre. Preuve est ainsi faite, une fois de plus, que nos inventions ne sont que le reflet de celles de Dame Nature. J'ajouterais qu'au-delà des apparences, les plus insignifiantes bestioles (fussent-elles nuisibles !) méritent bien une "page entomo" … et l'espoir d'ainsi susciter votre curiosité … voire votre intérêt
 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), adultes accouplés.  Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ),  adulte photo 1

Présentation !

La chrysomèle de la viorne (alias Pyrrhalta viburni pour les initiés !), encore appelée galéruque de la viorne, est un petit coléoptère (ci-contre !) relevant de la nombreuse Famille des Chrysomélidés. Alentour de 750 espèces vivent en effet sur notre sol, et plus de 35.000 sont par ailleurs répertoriées au niveau mondial. Ce sont des insectes phytophages, pour la plupart phyllophages (et donc mangeurs de feuilles !), et cela tant à l'état adulte que larvaire. Les chrysomèles sont souvent plus ou moins spécialisées au niveau alimentaire, et les productions vivrières (légumières, céréalières, et fruitières) concernées par ce préférendum peuvent sérieusement en pâtir.

Présentement le nombre et la boulimie larvaire compensant la petitesse de notre bestiole (5 à 6 mm à l'état adulte), il en résulte souvent de très spectaculaires défoliations, se répétant souvent d'une année sur l'autre. En pareil cas il peut s'ensuivre un dépérissement parfois fatal de ces arbustes ornementaux, dont les espèces les plus connues sont logiquement appelées "Boules de neige" en raison de la forme et de la blancheur de leurs fleurs.

 
Viorne, dite "boule de neige", photo 1 Viorne, dite "boule de neige", photo 2 Viorne, dite "boule de neige", photo 3
La bien nommée "Boules de neige" ... rondeur et blancheur !
 
 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts larvaires sur viorne, photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts larvaires sur viorne, photo 2 ...............Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts larvaires sur viorne, photo 3
 ci-dessus à gauche : les attaques sévères et répétées d'une année sur l'autre peuvent très mal finir; à droite : à titre d'exemple ce jeune arbuste ne donnera jamais de "boules de neige" ... ni même le moindre "flocon" ! ci- dessous à gauche : quand les mandibules larvaires vont bon train, le feuillage peut très vite passer du stade dentelle à celui de ... "squelette" ! à droite : les insectes adultes ont également la dent dure, comme le montrent ces très typiques attaques.
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts  larvaires sur feuille de viorne, détail, photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts  larvaires sur feuille de viorne, détail, photo 12 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts  larvaires sur feuille de viorne, détail, photo 13 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts  larvaires sur feuille de viorne, détail, photo 14............. Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts  de l'adulte  sur feuille  de viorne, détail, photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts  de l'adulte  sur feuille  de viorne, détail, photo 12
 
 
 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), carte répartition en FranceD'origine eurasiatique cette galéruque, le plus souvent qualifiée de "chrysomèle de la viorne", ne semble pas aussi fréquente que l'est sa plante de prédilection. C'est ainsi que dans l'Ouest de la France, où je réside, elle y fait largement figure de "parent pauvre", du moins selon les données du site de de l'INPN (Inventaire National du Patrimoine Naturel). Certes les bonnes volontés naturalistes ont plus attrayantes données à transmettre, mais si la bestiole abondait en ces lieux, cela se saurait !

Pour l'anecdote vous noterez que cette chrysomèle a été introduite en 1947 sur le continent américain, lequel nous avait précédemment "refilé" le doryphore, autre chrysomèle non moins ravageuse ! D'aucuns y verront une sorte "d'échange de bons procédés", mais de nos jours la mondialisation nous vaut la survenue de nombreuses espèces animales et végétales, pour certaines à juste titre qualifiées "d'envahissantes", d'où une nuisibilité accrue, et là c'est nettement moins drôle !

Pour conclure cette présentation vous noterez qu'il y a de multiples espèces et variétés de Viburnum (et donc de viornes en bon français !), toutes n'ayant pas le même attrait décoratif à nos yeux … ni la même saveur "gustative" pour notre petite chrysomèle ! Certaines viornes sont en effet quasi plébiscitées (telles les Virbunum opulus, lantana, trilobum, ou encore tinus) là où d'autres sont nettement moins appréciées, telle V. lentago, voire franchement délaissées. A défaut de grives on mange dit-on des merles, d'où de possibles adaptations. Vous l'aurez compris, mieux donc "veiller à la viorne", comme on le fait du "grain" … des fois que !

Le cycle biologique … en (très) bref !

Cette chrysomèle (Pyrrhalta viburni, je le rappelle !) est en quelque sorte annuelle, avec éclosions des larvules en avril-mai, et bouclage de la période larvaire en moins d'un mois. La nymphose a lieu dans une petite logette terreuse souterraine, avec émergence des adultes courant juillet. Accouplements et pontes font suite, et on peut dire qu'à la mi-août la "messe est quasi dite", même si quelques retardataires sont encore visibles. Reste aux œufs a affronter les rigueurs hivernales, et autres "risques du métier", sans parler des redoutables "taille-haies", lesquels ont tôt fait d'araser les nouvelles pousses, et d'ainsi éliminer de nombeuses pontes.

Le développement larvaire !

Dès son émergence, la larvule naissante s'installe sous une feuille et "passe à table" en s'attaquant à la sous-couche charnue (parenchyme), seule partie dont la tendreté est compatible avec les jeunes mandibules. De ce fait les zones attaquées apparaissent comme "vitrées", car l'épiderme de la partie supérieure des feuilles (très mince et semi translucide) est typiquement préservé … mais pas pour longtemps !

 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts de jeune larve, photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), dégâts de jeune larve, photo 2..............
Délaissant la trop coriace cuticule de la feuille, les mandibules naissantes y dessinent dans un premier temps de translucides méandres, avant de très vite prendre de l'assurance ... et ne plus rien délaisser ! Vous remarquerez (cerclées de rouge) quelques mues témoignant à la fois du passage au 2e stade larvaire, mais aussi de la petitesse du premier, et donc de la larvule naissante (1 à 2 mm)
 

La larve proprement dite comporte 3 stades, mais leur différenciation n'est pas évidente dans la mesure où la taille peut énormément varier entre le début et la fin d'un stade donné, et le comparatif ci-dessous à gauche illustre le propos Cette variation de la taille s'observe pareillement chez les chenilles, et c'est même encore "plusss pire", car le développement de ces dernières comporte généralement 5 stades, et la différence de taille entre la naissance et l'arrivée à terme peut être considérable, comme l'exemple ci-dessous à droite en témoigne.

La coloration larvaire de cette chrysomèle peut s'avérer quelque peu trompeuse, du moins au niveau du stade intermédiaire (et donc du 2e), ladite coloration étant elle-même … intermédiaire ! Initialement noires à la naissance l'amorce de la couleur jaune devient nettement perceptible à la fin de ce 1e stade, et toujours sous l'effet de la croissance le "jaunissement" s'accentue non moins nettement au terme du second, d'où de possibles confusions avec les débuts des 2e et 3e stades. Comme les illustrations le montrent le jaune domine franchement chez les larves à terme, mais de très nombreuses petites macules noires sont néanmoins bien visibles.

En fait le seul repère fiable, et imparable, porte sur la capsule céphalique (autrement dit le "crâne" !), partie très chitinisée, dont la taille varie uniquement lors des mues, et donc des changements de stades. Présentement la petite taille des larves, ne facilite pas les comparaisons, d'autant que les têtes sont bien souvent en partie dissimulées dans les replis du corps.

 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), évolution  larvaire au sein d'un même stade............Sphix tête de mort (Acherontia atropos) évolution  larvaire, entre le 1er et le 5e stade, photo 1 Sphix tête de mort (Acherontia atropos) évolution  larvaire, entre le 1er et le 5e stade, photo 2
 à gauche : illustration du gain de taille de notre galéruque entre le début et la fin de ses 2e et 3e stades larvaires; à droite, pour info : gain de taille (10 fois), et de poids (7500 fois) de la chenille du Sphinx tête de mort (Acherontia atropos) ... et cela en 30 jours ! (agrandissements impératifs ! )

A tous les stades de leur développement les larves se tiennent de préférence au revers des feuilles, ce qui limite leur visibilité en regard des prédateurs ... fonction parapluie ou parasol en prime ! Ces divers avantages sont toutefois à relativiser car la croissance de ces larves et leur boulimie font qu'elles peuvent aller jusqu'à "squelettifier" les feuilles en ne laissant que les grosses nervures. Avant d'en arriver là, les "dentellières de la viorne" (si je puis dire ! ), tendent à s'approprier une célèbre spécialité calaisienne tant les feuille sont finement (et joliment ?) ajourées. Au passage vous noterez que la bestiole est répertoriée du Calaisis, mais là je me garderais d'évoquer tout rapport avec la bionique !

Pour parer aux coups de vents, où tout simplement se stabiliser au revers du feuillage, ces larves disposent d'un puissant "pygopode", organe exertile situé à l'extrémité de l'abdomen. Il s'agit d'une sorte de 7e patte ajoutant aux facultés locomotrices des larves, tout en ayant des propriétés adhésives "anti-chutes" très efficientes.

Fonctionnant un peu sur le modèle des "post-it", ce dispositif s'observe chez d'autres larves, notamment celles du ver luisant. Chez cette dernière espèce la morphologie et les propriétés du pygopode sont cependant si peu banales qu'elles méritent bien une petite parenthèse. De fait, cette pseudo "7e patte" ressemble étonnamment à nos "balais à franges", et par-delà les fonctions habituellement dévolues à cet organe (locomotion, stabilisation, ancrage), les digitations de ce "balai" peuvent se muer en véritable "gant de toilette". Son efficacité est telle qu'il permet à la bestiole de se débarrasser des plus tenaces résidus et encrassements issus du gluant mucus des escargots, ses proies de prédilection (cf. site).

 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), illustration du pygopode , photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), illustration du pygopode , photo 2 ..............Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), pygopode en action , photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), pygopode en action , photo 2 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), pygopode en action , photo 3
ci-dessus : morphologie, et démonstration de l'efficience du "pygopode", comme le texte ci-dessus l'explique..
ci-dessous : le pygopode du ver luisant (à titre comparatif) : mêmes fonctions locomotrices et adhésives ....  gant de toilette en sus !
Ver luisant (Lampiris noctiluca), détail du pygopode, photo 1 Ver luisant (Lampiris noctiluca), détail du pygopode, photo 2 Ver luisant (Lampiris noctiluca),  pygopode en action, photo 1 Ver luisant (Lampiris noctiluca),  pygopode en action, photo 2 Ver luisant (Lampiris noctiluca),  pygopode en action, photo 3
 
 
Panel larvaire !

La découverte relativement tardive de ces viornes parasitées fait que j'ai en quelque sorte "raté un épisode", à savoir la totalité du 1er stade larvaire, émergence comprise. De plus il a fallu compter avec la découverte d'un nombre très restreint d'individus encore au second stade, sans parler de la grande disparité des tailles et de la coloration au sein d'un même stade, comme précédemment montré. Vous l'aurez compris, faute d'avoir pu assurer le suivi de l'intégralité du développement larvaire, les illustrations ci-dessous sont de ce fait des approximations, voire des extrapolations ... en attendant mieux !

... les jeunettes !
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve sur allumette. Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve, photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve, photo 2 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve, photo 3 
 
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve, photo 4 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve, photo 5 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), jeune larve, photo 6
 
... les grandinettes !
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 2 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 3 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 4 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 5
Ci-dessous : illustration d'une mue, et en l'occurrence d'un probable passage au second stade (= L3)
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 6 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 7 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " grandinette ", photo 8
 
  ... et les seniors !
Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " gseniors ", photo 1 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " gseniors ", photo 2 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " gseniors ", photo 3 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " gseniors ", photo 4 Chrysomèle de la Viorne (Pyrrhalta viburni ), larve " gseniors ", photo 5
 
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr