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La RHYSSE PERSUASIVE (Rhyssa persuasoria) !
(Hyménoptère Ichneumonidae)
 
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Intro !
En quoi la Rhysse est-elle persuasive ?
Comme aurait dit Coluche "en voilà une question qu'elle est bonne !"
 
L'origine de cette appellation est en effet aussi énigmatique que celle du "mystère et boules de gommes" de notre enfance. De plus il est assurément un peu tard pour en référer au descripteur de la bestiole, puisque le grand naturaliste suédois Carl von Linné n'est plus de ce monde ... depuis l'an de grâce 1778 !
 
Je suis cependant persuadé que la Rhysse sera suffisamment persuasive pour vous inciter à parcourir cette énième "page entomo" ...
... puisqu'elle m'a incité à l'écrire !
 
Présentation

La Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) fait partie des plus grands Ichneumons de notre faune, mais aussi d'Europe, et c'est notamment l'ennemie jurée des larves du Sirex géant (cf. page entomo dédiée). Comme sa cousine Rhyssa amoena, ou encore Dolichometus imperator (cf. page entomo "Rhagium inquisitor") ces Hyménoptères sont qualifiées de "parasitoïdes", car leur développement larvaire provoque à terme la mort de l'hôte, alors qu'un vrai parasite se contente de vivre à ses dépens. Ce sont également des "ectoparasites" car leurs larves se développent à l'extérieur de l'hôte, là où celles des "endoparasites" évoluent en interne ... CQFD !

Le dimorphisme sexuel et l'accouplement !

Comme les illustrations ci-dessous le montrent, les très visibles organes de pontes que sont les tarières étant bien sûr l'apanage des femelles, les mâles en sont non moins logiquement dépourvus. Par-delà l'évidence du dimorphisme sexuel, les préludes à l'accouplement proprement dit font mieux que valoir le détour !

 
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) femelle en main, Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) femelle, in situ, photo 1 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) femelle, in situ, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) nourrissage digital.
Ci-dessus : habitus de femelles et leur quasi interminable tarière; à droite: un apprécié nourrissage digital à base de miel.
 
 
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) mâle, in situ, photo 1 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) mâle, in situ, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) mâle, in situ, photo 3. Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) mâle, in situ, photo 4
Ci-dessus : les mâles se distinguent aisément par la logique absence de tarière, apanage non moins logique des femelles; ci-dessous à gauche : le "masque" jaunâtre, autre critère parfaitement distinctif, mais cependant moins évident et visible que l' absence de tarière; à droite : cet accouplement, a priori classique, est en fait loin de l'être !
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) masque facial mâle, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) masque facial mâle, photo 3.......................Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) accouplement.
 
La "mêlée copulatoire": Comme souvent chez les insectes, les mâles de rhysses "émergent" quelques jours avant les femelles, afin d'être parfaitement "opérationnels" le moment venu. De fait la quête d'une partenaire semble prévaloir sur toute autre considération, notamment alimentaire, du moins pour cette espèce. Des ombellifères en fleurs jouxtant "mes" troncs sont en effet totalement délaissées, alors que les rhysses s'y goinfraient lors d'un élevage datant de 2011.

En Loire-Atlantique, et donc là où je réside, les bestioles sont actives à compter de la mi-Mars, par temps ensoleillé s'entend. Les vols s'observent dès 10 h du matin (heure légale), moyennant une température minima de l'ordre d'une douzaine de degrés. Evoluant plus ou moins en "rase-mottes" les mâles en maraude ne cessent de survoler les grumes de sapin blanc (Abies alba pour les intimes !). Ces quêtes aériennes sont entrecoupées de phases exploratoires pédibus, charge aux extrémités antennaires ( là encore typiquement recourbées ! ), d'y détecter les indices (grignotages par exemple) laissant présager une future émergence. Au fil des jours, en l'espace d'un mois, les effectifs des 2 sexes ne cessent d'évoluer, le quota des mâles régressant, là où celui des femelles actives progresse, ces dernières étant pareillement vouées à peu à peu disparaître une fois la ponte achevée.

 
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  butinage sur ombellifères, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  butinage sur ombellifères, photo 3
Ci-dessus : les ombellifères font florès .... mais c'était en 2011 !
Ci-dessous : le providentiel abandon de ces grumes de sapin blanc a fait mon bonheur, mais aussi et surtout celui des Rhysses (R. persuasoria) et bien sûr des Sirex (Urocerus gigas), entre autres xylophages. C'est là aussi que j'ai eu la chance de trouver Megarhyssa vagatoria, espèce nouvelle pour la France, décrite en 2021.
Sapin blanc (Abies alba)  grumes à rhysses, photo 1 Sapin blanc (Abies alba)  grumes à rhysses, photo 2 Sapin blanc (Abies alba)  sur pieds. Sapin blanc (Abies alba)  grumes à rhysses, photo 3 Sapin blanc (Abies alba)  grumes à rhysses, photo 4
 
Bien entendu le grignotage d'un futur trou de sortie alerte les mâles en maraude, et quand une femelle pointe son museau à la surface du bois les affriolantes phéromones sexuelles qu'elle émet ont tôt fait de les attirer au plus près de l' "objectif" sexuellement convoité. La concurrence étant de règle, les plus faibles se font "houspiller" sans ménagement, là où les plus agressifs peuvent parfois se livrer à de brèves "empoignades" où les mandibules ne sont pas en reste. Il peut évidemment s'ensuivre des éclopés, le pire étant même possible, rarement il est vrai .

Face à tous ces mâles prêts à littéralement lui "sauter dessus" la femelle donne la nette impression de temporiser, tant elle semble hésiter à affronter une telle cour de prétendants à l'évidence "chauds bouillants". Quand elle se décide à sortir de son trou, ce qui peut demander "un certain temps" faute de déterminisme avéré, la ruée est alors immédiate. Il s'ensuit une mêlée pour le moins indescriptible, pouvant regrouper et même dépasser la dizaine de "concurrents". Il faut également compter avec des retardataires, s'efforçant avec plus ou moins de succès d'insinuer leur abdomen au cœur de la grouillante effervescence ... en l'espoir ( le plus souvent vain ! ) de faire mieux que simplement participer !

Alors que le percement du trou de sortie témoigne évidemment du quasi achèvement du processus de sclérification ( = durcissement des téguments ! ), la longue tarière des femelles reste au contraire aussi rigide qu'un brin de laine, ce qui lui permet de subir sans dommages la furia sexuelle des mâles, avant d'elle-même se sclérifier et d'ainsi devenir apte à forer le bois ... et y pondre !

Bien que ce soit "fait pour", le sort des femelles paraît bien peu enviable tant elles sont assaillies de toutes parts, brassées en tous sens, pour ne pas dire malmenées voire brutalisées. A terme elles donnent l'impression d'être quelque peu "sonnées" ( on le serait à moins ! ), et c'est encore plus vrai quand il s'agit de petites femelles face à des "gros bras". Si les violences sexuelles animales étaient condamnables Dame Nature aurait à coup sûr du souci à se faire !

 
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  femelle émergente entourée de mâles, photo 1 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  femelle émergente entourée de mâles, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  femelle émergente entourée de mâles, photo 3 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  femelle émergente entourée de mâles, photo 4 ........... Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  femelle émergente entourée de mâles, photo 5
Ci-dessus : à gauche : les femelles en instance de sortie sont très attendues, mais aussi entourées, dans tous les sens du terme; à droite : illustration du "flair" des mâles : sur des grumes de 4 à 5 m de longueur l'amorce (0,5 mm) du trou de sortie d'une femelle est déjà parfaitement détecté. Les premiers mâles sont déjà là, d'autres suivront; ci-dessous : exemples de "mêlées copulatoires", in situ et en main.
.Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  mêlée copulatoire, photo 1 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  mêlée copulatoire, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  mêlée copulatoire, photo 3 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  mêlée copulatoire, photo 4 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  mêlée copulatoire en main.. 
 
 
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  comparaison du trou d'émergence, avec un sirex Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  émergence d'un mâle.
à gauche : cette vue rapprochée permet de comparer le trou de sortie d'une rhysse femelle dont la tête est visible, côtoyant celui nettement plus grand (et ancien ! ) du Sirex gigas dont les larves sont précisément "parasitées" par les rhysses; à droite : la sortie d'un mâle, reconnaissable à sa face jaune, peut susciter l'intérêt sexuellement exacerbé de 2 ou 3 congénères du même genre, avec parfois de très brèves velléités d'accouplement.
 
Selon leur position à la périphérie d'un tronc les mêlées peuvent à l'occasion se mouvoir un peu, et même chuter, mais sans pour autant se désunir. La tenue en main de l'une d'elles témoigne bien de cette cohésion, constatée 2 fois in natura. Pour l'avoir observée à plusieurs reprises, la même frénésie copulatoire, identique quant au fond et la forme, est de règle chez l'abeille du lierre (Colletes hederae), comme cette vidéo le montre.

A la fin il n'en restera qu'un (comme dans Koh Lanta !), les laissés pour compte de cette peu banale mêlée n'ayant d'autre choix que celui de se remettre en quête. Bien qu'il soit semble-t-il unique (observations aidant, et spermathèque faisant) cet accouplement contribue à pérenniser l'espèce, et pour Dame Nature c'est là l'essentiel. Ainsi va la Vie au pays des Rhysses, et cette exceptionnelle vidéo en témoigne parfaitement. Par contre, en regard d'accouplements nettement plus conventionnels, et habituels, on est en droit de penser ... "tout ça pour ça" !

De même que les voies du Seigneur sont dit-on impénétrables, Dame Nature a de toute évidence ses raisons que la raison ignore. Telle sera la conclusion d'un chapitre que j'ai eu beaucoup de plaisir à écrire et illustrer, et plus encore à découvrir "in situ" ... au prix d'une très chronophage assiduité !

 
Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  in copula, après mêlée, photo 1 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  in copula, après mêlée, photo 2 Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria)  in copula en main.
à gauche : tout a une fin, y compris les "mêlées copulatoires". La petitesse du mâle montre que tous ont leur chance ... et cela vaut aussi pour les femelles ! au centre : au terme de la mêlée, et encore quelque peu "sonnée", cette grande femelle a entrepris d'inventorier mon "matos"; à droite : la même en main !
  
 
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr