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les barbillons du " chibani " !
 
Barbillon ou barbeauDans les années 50 mon père avait été muté au Maroc, et nous habitions dans le Moyen Atlas. Avec un bon copain, lui même " fana " de Nature, nous allions souvent à la pêche....
 
Ce jour-là le petit oued Ouislam se montrait prodigue, et comme toujours nous espérions tomber sur un gros barbillon, ce qui là comme ailleurs ne s'était jamais produit.
 
A défaut de barbillon, on a vu arriver un vénérable barbu. C'était un " chibani ", autrement dit un très vieil arabe, et lui aussi pêchait.
 
En guise de canne il tenait une perche de roseau raide comme une trique, et son fil tenait davantage du câble que du traditionnel nylon. Par ailleurs un simple bouchon de bouteille faisait office de flotteur, tandis qu'un gros écrou remplaçait l'habituelle plombée.
 
Le poids des ans, et le rudimentaire du matériel, le rendait à nos yeux pathétique, et nous avions quasiment honte de notre bel équipement. D'un commun accord il a donc été décidé de le faire profiter de notre pêche, et à l'occasion de lui donner quelques hameçons, ce que nous savions toujours très apprécié.
 
Entre " collègues " la glace se rompt vite, et non sans une certaine fierté nous exhibons des bourriches frétillantes à souhait, et bien entendu nous escomptions les compliments d'usages.
 
Le vieil homme s'est alors contenté d'hocher la tête, et d'esquisser un sourire largement édenté. Dans le même temps il a posé à terre son traditionnel cabas trapézoïdal en " doum " tressé (= palmier nain), et avec l'ampleur d'un passeur de muleta il a enlevé la grande guenille qui le recouvrait.
 
Les " moustachus " de nos rêves sont alors devenus réalité. Ils étaient là, énormes, et il y en avait bien une demi-douzaine, avec les têtes d'un côté du panier et les queues de l'autre. Le regard malicieux de notre " chibani " se passait à l'évidence de commentaire, et nous nous sentions parfaitement ridicules tant nos prises se voyaient reléguées au rang d'alevins.
 
Notre homme était en quelque sorte pêcheur professionnel, et il a eu la gentillesse de nous faire une " démonstration ", et de nous écœurer encore un peu plus car il remettait à l'eau des poissons qui auraient fait nos beaux dimanches.
 
Cela dit son sens de l'eau était vraiment hors du commun, et avant de jeter l'appât il scrutait longuement chaque courant, remous, et rocher. On peut même dire qu'il les auscultait tant il était attentif, et donnait l'impression de chercher le poisson des yeux, et pour tout dire de le voir.
 
Il pêchait avec un énorme hameçon sur lequel il empalait un escargot de bourgogne grossièrement décoquillé. L'appât était le plus souvent déposé en plein courant, le bouchon maintenu à fleur d'eau, et il n'attendait jamais plus de quelques dizaines de secondes. Quand un poisson mordait, il était mis au sec en force, et sans fioritures aucunes. Dans le cas contraire l'appât était changé de place, mais le plus souvent c'était notre étonnant pêcheur qui lui-même se déplaçait de quelques mètres, sans quasiment quitter l'onde des yeux.
 
Au final on lui a acheté des escargots, quasi introuvables à la saison, et bien sûr on a essayé de mettre la leçon à profit. C'était plutôt positif par rapport à ce que nous avions l'habitude de prendre, mais les gros moustachus de notre " chibani " sont toujours restés du domaine du rêve.
 
 
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